Faire de la rue Victoria une rue habitée
Parcs existants et réseau de corridors de biodiversité proposés pour le quartier Saint-Sauveur.
Carte: CCCQSS, Verdir Saint-Sauveur et Nature Québec, 2020
par Simon Parent
Tandis que les bouleversements écologiques se multiplient un peu partout, les rues continuent d’être traitées comme de simples surfaces de bitume que l’on consacre à la circulation des voitures. En plus d’encourager les usages automobiles, cela étouffe les sols et empêche les espèces vivantes d’y trouver refuge. Il est essentiel de transformer ces espaces publics de manière à accueillir un plus grand nombre d’espèces vivantes dans les milieux urbains – plantes, arbres, insectes, oiseaux, etc. On pourrait, d’un même coup, améliorer la santé des sols et les expériences citoyennes liées, entre autres, à la vie communautaire et à l’agriculture urbaine.
Vers un réseau de permaculture*!
C’est avec cette intention qu’en 2020, Verdir Saint-Sauveur (VSS), en collaboration avec Nature Québec, présentait un réseau de corridors de biodiversité reliant le parc linéaire de la rivière Saint-Charles (nord) au coteau Sainte-Geneviève (sud) en traversant le quartier Saint-Sauveur.
Pour intégrer ce réseau au quartier, les organismes proposaient de transformer certaines rues en corridors de biodiversité. Cela permettrait de :
• Relier des espaces existants qui abritent déjà une diversité d’espèces (les parcs);
• Favoriser la continuité des sols et des espaces végétalisés;
• Accueillir une multitude d’espèces vivantes ;
• Créer des lieux de rassemblement pour les citoyens·nes ;
• Faire de la rue un lieu de rencontre, de partage et de permaculture*.
*La permaculture
Le terme « permaculture» renvoie à la «culture permanente » (de l’anglais « permanent agriculture »). Ce concept s’est élargi avec le temps pour intégrer la place de la « culture » au sein même de la « nature », de manière à ce que les humains soignent les écosystèmes de façon pérenne, comme le font, depuis des siècles, les nations autochtones.
De « rue » à « parc linéaire »
C’est pour tester ces potentiels que VSS propose de transformer la rue Victoria en un lieu qui soit à la fois plus convivial pour les communautés qui résident dans le secteur et plus végétalisé, et donc habité par une multitude d’espèces vivantes.
Pourquoi la rue Victoria ?
Parce qu’elle est le lien le plus fréquenté par les piétons·nes de SaintSauveur pour accéder à la Haute-Ville. Elle sert aussi de corridor pour les enfants qui vont aux écoles Marguerite-Bourgeoys et Perreault. Pourtant, les trottoirs y sont étroits et encombrés, et la visibilité aux intersections est réduite, ce qui rend les traversées dangereuses. Bien qu’elle ait reçu la désignation « rue partagée », aucun aménagement structurant n’améliore l’expérience piétonne, ou renforce le sentiment d’un quelconque partage.
En travaillant sur cet axe, nous souhaitons démontrer qu’il est possible de changer la nature des sols de manière à offrir des espaces conviviaux aux communautés locales tout en respectant la biodiversité
Faire de la rue un corridor de biodiversité
Nous proposons alors de transformer la rue Victoria en un corridor de biodiversité pour en faire un espace de permaculture favorable à l’émergence d’une biodiversité locale. Un lieu de rencontre pour habiter, ensemble, un territoire dont nous prendrons soin. Une transformation pour établir, en milieu urbain, des relations respectueuses de la Terre : retrait du bitume, diminution des espaces consacrés à la voiture, continuité des sols et des végétaux, accueil d’une biodiversité indigène, absorption des eaux pluviales, diminution des îlots de chaleur, renforcement des lieux et des liens communautaires, ouverture des perspectives nourricières, autonomisation des communautés locales, etc.
Nous croyons que ce type d’intervention pourrait s’appliquer à l’ensemble du réseau, voire du territoire urbanisé. Ne plus ajouter de rues, mais bien en retirer. Faire place à la biodiversité. Car il s’agit en fait de choisir, maintenant, l’héritage que nous souhaitons léguer, demain, aux générations suivantes : des surfaces de bitume servant aux voitures ou des sols riches permettant l’accueil d’une biodiversité indigène. Au final, que pensez-vous que nos enfants préféreront ? •