Locataire recherche logement abordable : bonne chance !
Par Jonathan Carmichael, du Bureau d’aide et d’animation logement (le BAIL)
À moins que vous soyez ministre du gouvernement caquiste ou activiste en complet-veston d’un lobby de propriétaires immobiliers, vous avez probablement remarqué que le Québec est plongé dans une crise du logement. Régulièrement, les médias relatent des situations vécues par les locataires aux quatre coins de la province. Quand ce n’est pas la flambée des loyers qui fait la manchette, ce sont des exemples d’abus, de tentatives de réno-évictions et d’annonces discriminatoires de logement à louer.
Situation corsée à Québec
À Québec, la situation n’est pas plus reluisante pour les locataires. Les logements disponibles se font plus rares qu’il y a deux ans. Les taux d’inoccupation* ont chuté à 2,7 % dans la région et à 2,2 % dans le secteur de la Basse-Ville.
Taux d’inoccupation
Pourcentage des logements qui sont vacants, où personne ne réside. Le marché est considéré comme équilibré quand le taux d’inoccupation est supérieur à 3 %.
Les loyers, eux, augmentent rapidement. Selon les données de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), un 4 et demi dans la région de Québec se loue 900 $ en moyenne. Ces cinq dernières années, les loyers ont augmenté de 14,2 %, presque trois fois la hausse du coût de la vie pour la même période. Avec la pénurie de logements locatifs qui s’installe, on peut craindre le pire pour la suite.
De plus, on constate une hausse marquée des stratagèmes malveillants utilisés par certains propriétaires pour obtenir le départ de locataires dont le loyer ne serait pas suffisamment rentable. Au BAIL, les appels concernant les atteintes au parc locatif et au droit au maintien dans les lieux (reprises de logement, réno-évictions, évictions pour changement d’affectation, etc.) ont quintuplé ces deux dernières années.
Et dans Saint-Sauveur ?
Le quartier Saint-Sauveur n’est pas en reste, hélas. Au contraire, c’est probablement un des quartiers de Québec où les locataires sont les plus affectés·es par la crise du logement.
Saint-Sauveur a longtemps eu la réputation d’être un quartier où les logements étaient plus abordables. Force est de constater que c’est de moins en moins le cas. Il suffit de jeter un œil sur les annonces de logements à louer pour s’en convaincre.
Selon une enquête effectuée par le BAIL à l’hiver et au printemps 2020, le loyer affiché dans les annonces de logements à louer était en moyenne de 970 $ par mois dans le quartier Saint-Sauveur. La flambée des loyers est évidente : les logements à louer sont en moyenne presque 250 $ plus chers par mois que l’ensemble des logements du quartier.
Enquête effectuée par le BAIL
Dans cette enquête le BAIL a recensé 1889 annonces de logements à louer dans les quartiers centraux de Québec, dont 459 dans Saint-Sauveur
Également, quand on regarde d’où viennent les locataires qui ont contacté le BAIL à la suite d’une réno-éviction, Saint-Sauveur trône en tête des quartiers de Québec. Visiblement, plusieurs propriétaires immobiliers veulent profiter de la gentrification qui frappe le quartier.
Pour un contrôle obligatoire des loyers
La crise du logement est une occasion de mettre à nouveau en lumière le fait que le marché locatif privé n’est pas capable de se gérer lui-même et n’est pas en mesure de répondre aux besoins de la population. Pour le privé, le logement est principalement un secteur d’investissement à rentabiliser au maximum, une logique qui ne se soucie guère de l’abordabilité des loyers.
La crise est également une occasion de remettre à nouveau en lumière l’inefficacité des mécanismes facultatifs de contrôle des loyers tels qu’on les connaît au Québec. Selon les groupes de défense de droits des locataires, il faut rendre obligatoire ce contrôle via l’application automatique des taux annuels publiés par le Tribunal administratif du logement. •