Pandémie et pénurie de logements ne font pas bon ménage
Par Éloïse Gaudreau
Photo : Claude Boucher, licence CC BY-SA et GNU free documentation licence.
Chaque année, le 1er juillet apporte son lot de déménagements. Si pour certains·es, cette date est synonyme de boîtes à défaire et de pizza, pour d’autres, elle signifie anxiété, stress et risque. Plusieurs locataires n’ayant pas renouvelé leur bail voient le 1er juillet approcher en craignant de ne pas trouver de logement. Véronique Laflamme, du FRAPRU, nous explique comment le duo pandémie et pénurie de logements compliquera la situation de plusieurs locataires.
Pourquoi dit-on que le 1er juillet sera plus difficile cette année?
Premièrement, il y a le contexte de la pandémie. Plusieurs locataires n’ont pas pu faire de recherche de logement pendant le confinement. Les visites n’étaient pas interdites en soi, mais le premier ministre et la Santé publique les ont déconseillées, avec raison.
Ainsi, plusieurs propriétaires ou locataires n’étaient pas à l’aise avec le fait de faire des visites de logement. Et là, il reste trop peu de temps pour chercher un logement. De plus, le contexte de pandémie apporte tout un lot de discriminations supplémentaires.
De la discrimination supplémentaire?
Avec la pandémie, plusieurs propriétaires se sont tournés vers les visites virtuelles. Et il y a plusieurs locataires qui n’y ont pas accès, parce qu’ils et elles n’ont pas accès à un ordinateur ou à Internet. Encore là, les visites virtuelles sont utilisées comme filtre pour les visites en personnes. Ça favorise un certain profil de locataire.
Il reste quand même quelques semaines pour que les locataires trouvent un logement, non?
Oui, mais il ne faut pas oublier le contexte de pénurie de logements. À Québec, même sans la pandémie, on s’attendait déjà à un 1er juillet difficile, avec plusieurs ménages sans logis à cette date.
Dans les quartiers centraux, la situation est encore plus tendue. En Basse-Ville, on parle d’un taux d’inoccupation de 1,8 %, alors que le seuil d’équilibre est de 3%. Et avec la gentrification qu’on voit dans Saint-Sauveur, les logements qui sont disponibles sont loin d’être toujours abordables.
Est-ce qu’il y a des façons de régler ça?
Depuis le début de la pandémie, le FRAPRU demande au gouvernement du Québec de prolonger les baux. Au lieu de finir le 1er juillet, les baux auraient pu être prolongés d’une durée équivalente à celle des mesures d’urgence pour éviter le casse-tête auquel on se prépare. Mais à quelques semaines du 1er juillet, on n’a pas l’impression que ça va être retenu.
À ce stade-ci, on est rendus à demander à ce que les locataires qui n’ont pas renouvelé leur bail aient une deuxième chance et qu’ils puissent le renouveler aux mêmes conditions si leur logement n’a pas encore été reloué.
Actuellement, le gouvernement se fie à la bonne volonté des propriétaires, mais au FRAPRU, on a des cas de locataires dont les propriétaires disent « Ok, mais on va signer un nouveau bail, et on va t’augmenter de 100$ ». Le contexte de pénurie de logements est vraiment propice aux abus et le gouvernement doit en tenir compte en protégeant mieux les locataires.
Il faut aussi que le gouvernement du Québec améliore et élargisse son programme d’aide d’urgence aux villes. Des villes comme Québec (où le taux d’inoccupation est au-dessus de 2%) ne sont pas admissibles au remboursement de leurs dépenses pour l’hébergement temporaire des locataires sans logement, l’entreposage de leurs biens et leur déménagement. •